Khoutbah n°1104
Discours du vendredi 20 novembre 2020 correspondant au 5 rabi^ al-‘akhir 1442 de l’Hégire
L’interdiction de s’empresser de déclarer mécréant
الحمد لله والصلاة والسلام على سيّدنا محمد رسول الله يا أيها الذين ءامنوا اتقوا الله
Al-hamdou lil-Lahi [1] was–salatou was-salamou ^ala sayyidina Mouhammad, raçouli l-Lah ; ya ‘ayyouha l-Ladhina ‘amanou t-taqou l-Lah.
La louange est à الله Allah Qui a créé l’être humain, Qui lui a accordé une constitution parfaite et une stature droite, et Qui lui a donné une apparence qu’Il lui a prédestinée ; Il lui a fait grâce de nombreux bienfaits et s’Il l’avait voulu, Il l’en aurait privé ; Il a créé des ouvertures en lui pour entendre et pour voir ; Il lui a donné une langue et l’a rendu capable de parler, Il l’a pourvu d’une raison et l’a rendu responsable de ses actes dans l’eau delà.
Que الله Allah honore et élève davantage en degré notre maître محمّد Mouhammad, l’élite de toute Sa création, ainsi que sa famille bienfaisante, ainsi que ses compagnons excellents.
Je témoigne qu’il n’est de dieu que الله Allah, le seul à ne pas avoir d’associé, de semblable, d’opposé ni d’équivalent. Je témoigne que notre maître محمّد Mouhammad est Son esclave et Son Messager, celui qu’Il a élu et qu’Il agrée, Son bien-aimé, que l’honneur et l’élévation en degré de la part de mon Seigneur, et la préservation de sa communauté de ce qu’il craint pour elle, lui soient accordés, ainsi qu’à tout messager qu’Il ait jamais envoyé.
Après quoi, esclaves de الله Allah, je vous recommande, ainsi qu’à moi-même, de faire preuve de piété à l’égard de العَظِيمِ الله Allah Al-^Adhim, en accomplissant ce qu’Il nous a ordonné de faire et en évitant ce qu’Il nous a interdit de commettre.
Certes les grâces de الله تعالى Allahou ta^ala sont très nombreuses, nous ne pouvons les énumérer. Il est تعالى ta^ala Celui à Qui nous appartenons, à Qui appartient tout ce dont Il nous a fait grâce. الله Allah nous a ordonné de Le remercier pour les bienfaits qu’Il nous accorde, et ceci en utilisant Ses grâces uniquement dans ce qu’Il nous a autorisés de faire, c’est-à-dire en n’utilisant pas Ses grâces dans ce qu’Il nous a interdit de commettre.
Ton argent, cher frère musulman est un bienfait de la part de الله تبارك وتعالى Allah tabaraka wata^ala, alors ne le dépense pas dans ce dans quoi الله Allah n’a pas autorisé de le dépenser. Ton corps est une grâce de la part de الله Allah, alors ne l’utilise pas dans la désobéissance à الله Allah. Ta main est une grâce de la part de الله Allah, alors ne l’utilise pas dans ce que الله Allah n’agrée pas. Tes pieds sont une grâce de la part de الله Allah, alors ne marche pas avec pour aller vers ce qui fait mériter le châtiment de الله Allah. Ton œil est une grâce de la part de الله Allah, alors ne regarde pas avec ce que الله Allah a interdit de regarder. Ton oreille est une grâce de la part de الله Allah, alors ne l’utilise pas pour écouter ce que الله Allah a interdit d’écouter. Ta langue est une grâce de la part de الله Allah, alors ne l’utilise pas dans ce que الله Allah a interdit de dire.
Alors crains Dieu, mon frère musulman, ne Lui désobéis pas avec les grâces qu’Il t’a accordées et dont Il t’a rendu propriétaire. Car, certes, si tu Lui désobéis, tu désobéis à Celui à Qui tu as le devoir d’obéir, tu auras été injuste envers toi-même et certes الله Allah n’agrée pas les injustes.
Parlons un peu, chers frères de foi, d’une grâce éminente parmi les grâces dont الله Allah a gratifié l’être humain, à savoir la langue. الله Allah a mentionné la langue, dans le قرءان Qour’an Honoré, parmi les nombreuses grâces qu’Il a accordées à Ses esclaves, puisque الله تعالى Allahou ta^ala dit :
﴿ أَلَمۡ نَجۡعَل لَّهُۥ عَيۡنَيۡنِ ٨ وَلِسَانٗا وَشَفَتَيۡنِ ٩ ﴾
(‘alam naj^al lahou ^aynayn waliçanan wachafatayn)
[sourate البلد Al-Balad / 8-9] ce qui signifie : « Ne lui avons-Nous pas accordé deux yeux, une langue et deux lèvres ? »
La langue est donc une grâce majeure qui procure de nombreux services, mais qui expose à de graves dangers ; au point qu’il a été dit à propos de la langue :
جِرْمُهُ صَغِيرٌ وجُرْمُهُ كَبِيرٌ
(jirmouhou saghiroun wajourmouhou kabir)
« Son volume est peut-être petit, mais son crime peut être grand » c’est-à-dire que malgré sa petite taille, les péchés que l’on commet avec sa langue peuvent être très graves.
Le Messager de الله Allah a fortement mis en garde contre les dangers de la langue, à de nombreuses reprises. Entre autres dans ce qui a été authentifié dans les سُنَن Sounan de At-Tirmidhiyy lorsque Mou^adh Ibnou Jabal, que الله Allah l’agrée, avait interrogé le Messager de الله Allah صلى الله عليه وسلم salla l-Lahou ^alayhi wasallam (que Dieu l’élève davantage en degrés et qu’Il le préserve de ce qu’il craint pour sa communauté) en lui disant : « Ô Prophète de Dieu, est-ce que nous allons rendre des comptes pour ce que nous disons ? », le Messager lui avait répondu :
(( ثَكِلَتْكَ أُمُّكَ يا معاذُ وهل يكُبُّ الناسَ في النارِ على وُجُوهِهم أو على مَناخِرِهِم إلّا حَصائدُ أَلْسِنَتِهم ))
(thakilatka ‘oummouka ya Mou^adh wahal yakoubbou n-naça fi n-nari ^ala woujouhihim ‘aw ^ala manakhirihim ‘il-la hasa’idou ‘alsinatihim)
ce qui signifie : « Fais attention ô Mou^adh, est-ce que la principale raison de l’entrée en enfer de la plupart des gens serait autre chose que la conséquence de leurs paroles ? »
Ainsi le Prophète صلى الله عليه وسلم salla l-Lahou ^alayhi wasallam (que Dieu l’élève davantage en degrés et qu’Il le préserve de ce qu’il craint pour sa communauté) a recommandé de préserver la langue, il a insisté en disant :
(( من كان يُؤمنُ باللهِ واليومِ الآخِرِ فَلْيَقُلْ خَيْرًا أوْ لِيَصْمُتْ ))
(man kana you’minou bil-Lahi wal-yawmi l-‘akhiri falyaqoul khayran ‘aw liyasmout)
ce qui signifie : « Celui qui croit en Dieu et au Jour dernier, qu’il dise du bien ou qu’il se taise. » Cela veut dire que lorsqu’on veut parler, alors, que l’on considère d’abord si les propos que l’on envisage de dire comportent du bien ou du mal. Si on a su qu’ils comportent un bien on parle, sinon on se tait.
Appliquer ce حديث hadith mène à préserver la religion, car si l’être humain dit oralement tout ce qui lui traverse l’esprit, sans réfléchir aux conséquences de ses propos, il se peut qu’il aille à sa perte en tombant dans une mécréance ou dans un péché. Au minimum, son temps sera perdu dans ce qui ne comporte aucune utilité. Surtout que la plupart des péchés sont des péchés de la langue. En effet, parler est ce qu’il y a de plus facile à faire pour l’être humain. Ainsi, quand certains sont interrogés sur un sujet, ils s’empressent de répondre et de donner un jugement, en prétendant que c’est un jugement de la religion, sans avoir appris et sans se baser pour répondre sur ce qu’ils ont entendu de la bouche des savants. C’est quelque chose qui mène à la perte. Il se peut même que certains répondent à quelqu’un qui leur a posé une question à propos d’une expression qu’il avait dite en lui disant : « Tu es tombé dans la mécréance », que Dieu nous en préserve. À la légère !… Sans réfléchir !… Alors qu’avant de lui dire : « Tu as fait de la mécréance », il aurait dû peser les propos de la personne sur la balance de la Loi, c’est-à-dire apprendre les règles de la Loi sur lesquelles on se base pour reconnaître les paroles de mécréance par la parole et œuvrer ainsi conformément à ce qu’ont décrété les savants de la jurisprudence.
Parmi ces règles, il y a qu’il faut vérifier à propos de l’expression elle-même : est-ce que c’est une expression ظاهر dhahir –plurivoque– c’est-à-dire qui admet, du point de vue de la langue, plusieurs sens, ou est-ce que c’est une expression صريح sarih –univoque– c’est-à-dire qui ne peut avoir qu’un seul sens du point de vue de la langue ? Si l’expression fait partie de ce qui est ظاهر dhahir, de ce qui peut admettre plusieurs sens, de sorte qu’en utilisant cette parole, dans certains cas ce sera de la mécréance et dans d’autres cas, ce ne sera pas de la mécréance, alors on ne déclare pas celui qui l’a dite mécréant, à moins qu’on ait su qu’il avait visé le sens qui est de la mécréance.
L’exemple en est ce qui a été rapporté de Mouhammad Ibnou Al-Haçan Ach-Chaybaniyy, qui fait partie des compagnons de Abou Hanifah, que الله Allah les agrée tous les deux, à savoir : « Si on a dit à quelqu’un : « Fais la prière » et qu’il a répondu « Je ne fais pas la prière ». S’il voulait dire par-là qu’il ne fait pas la prière parce qu’il l’a déjà faite, il ne sort pas de l’Islam ; s’il voulait dire : « Je ne fais pas la prière parce que c’est toi qui me le dis » il ne sort pas de l’Islam ; de même s’il voulait dire : « Je ne fais pas la prière parce que je suis paresseux. » Mais s’il voulait dire qu’il ne fait pas la prière car il se moque de la prière, dans ce cas il sort de l’Islam. » Fin de citation
Si l’expression est صريح sarih –univoque dans la mécréance– c’est-à-dire qu’elle n’a qu’un seul sens du point de vue de la langue, sens qui est de la mécréance, alors celui qui la prononce devient mécréant, sauf s’il n’en comprenait pas le sens véritable, mais pensait que cette expression avait un autre sens qui n’est pas de la mécréance, dans ce cas-là il ne sort pas de l’Islam.
Si donc on entend une parole صريح sarih –univoque dans la mécréance– et qu’on a une forte présomption, en raison de l’état de celui qui l’a dite, qu’il n’en comprenait pas le sens qui est de la mécréance, qu’il l’a prononcée en pensant qu’elle avait dans la langue, un sens autre que le sens qui est de la mécréance, et qu’il avait visé cet autre sens, dans ce cas-là, on lui dit : « Cette expression, du point de vue de la langue, lorsqu’on l’utilise dans ce contexte, n’a qu’un seul sens qui est de la mécréance, si tu l’as dite dans ce sens-là, alors tu dois témoigner qu’il n’est de dieu que الله Allah et que محمّد Mouhammad est le messager de الله Allah pour revenir à l’Islam. Mais si tu pensais que cette expression avait un autre sens, qui n’est pas un sens de mécréance, alors tu n’es pas tombé dans la mécréance, seulement tu ne dois plus la redire dorénavant, car sa signification est mauvaise du point de vue de la langue. »
Semblable à cela, si quelqu’un entendait une personne dire une parole contraire à ce qu’il connaît comme jugement de la religion, relatif au caractère licite ou interdit, sur un sujet quelconque, si celui qui a entendu sait que le jugement dans la religion est autrement que ce que disait la personne et ce par Unanimité de tous les savants, et que c’est quelque chose qui est bien connu de tout musulman, qu’il fasse partie des savants ou des gens du commun, il juge alors que ces propos reviennent à démentir la religion. Mais il ne convient pas, pour celui qui a entendu ces paroles, de s’empresser de déclarer mécréant celui qui a parlé et de l’accuser de vouloir contredire la religion. S’il a une forte présomption que celui qui a parlé ne connaissait pas le jugement et qu’il ne savait pas que ce qu’il a dit est contraire à la Loi révélée, mais pensait au contraire que le jugement dans la religion, c’est ce que lui a prétendu, en s’étant basé sur ce qu’il avait entendu des gens de sa région par exemple, ici, on ne le juge pas comme ayant voulu démentir la religion. Toutefois on dit qu’il s’est trompé, on lui enseigne donc ce qui est correct, à savoir le jugement à propos duquel il y a Unanimité des savants sur cette question. Et on lui enseigne que celui qui dit le contraire, en sachant que les musulmans depuis l’époque des compagnons jusqu’à nos jours considèrent que le jugement est celui à propos duquel il y a Unanimité, il devient mécréant, car il sera ainsi en train de démentir la religion. Il devra dans ce cas-là témoigner pour revenir à l’Islam, et nous lui enseignons qu’il doit apprendre avant de parler, et que donner un avis sans science est interdit, et fait partie des grands péchés.
Il convient donc à chacun de s’attacher au chemin le plus sûr dans ce sujet et de ne pas s’empresser d’accuser un musulman de mécréance sans preuve. Les savants ont dit :
إِدْخالُ كافِرٍ في الْمِلَّةِ أَمْرٌ عَظِيمٌ وإِخْراجُ مُسْلِمٍ مِنَ الْمِلَّةِ أَمْرٌ عَظِيمٌ
(‘idkhalou kafirin fi l-mil-lati ‘amroun ^adhimoun wa’ikhrajou mouslimin mina l-mil-lati ^amroun ^adhim)
« Prétendre qu’un mécréant fait partie de la communauté est quelque chose de très grave et prétendre qu’un musulman ne fait pas partie de la communauté est quelque chose de très grave. » Fin de citation
Il est donc un devoir de faire preuve de modération, c’est-à-dire de ne pas s’empresser à juger musulman quelqu’un qui est mécréant ou à juger qu’un musulman a commis de la mécréance. Le Messager de الله Allah صلى الله عليه وسلم salla l-Lahou ^alayhi wasallam (que Dieu l’élève davantage en degrés et qu’Il le préserve de ce qu’il craint pour sa communauté) a dit :
(( من قال لأخيه المسلمِ يا كافر فقد باء بها أحدهما فإن كان كما قال وإلّا رجعتْ عليه ))
(man qala li’akhihi l-mouslimi ya kafir faqad ba’a biha ‘ahadouhouma fa’in kana kama qal wa’il-la raja^at ^alayh)
ce qui signifie : « Si quelqu’un dit à son frère musulman « tu es mécréant », alors cette accusation retombe sur l’un des deux : soit il en est comme il a dit, soit elle retombe sur lui. »
Il se peut que le chaytan dise à quelqu’un : « Sauve cette personne ! Dis-lui tout de suite qu’il a dit de la mécréance, pour qu’il dise les deux témoignages et qu’il revienne à l’Islam. » Et ce, car le chaytan a un objectif qui est de pousser cette personne à juger un musulman mécréant sans droit, auquel cas celui qui aura porté cette accusation erronée sera devenu mécréant ou tout au moins désobéissant, et ceci plaît au chaytan.
Alors, mon frère musulman, rappelle-toi que si tu énonces une parole, elle sera inscrite en ta faveur ou bien contre toi, car الله Allah dit dans Son Livre Honoré :
﴿مَّا يَلۡفِظُ مِن قَوۡلٍ إِلَّا لَدَيۡهِ رَقِيبٌ عَتِيدٞ﴾
(ma yalfidhou min qawlin ‘il-la ladayhi Raqiboun ^Atid)
[sourate ق Qaf / 18] ce qui signifie : « Pas une parole qu’il prononce sans qu’il n’ait auprès de lui Raqib et ^Atid. »
Nous demandons à الله Allah de nous préserver des paroles qui comportent une désobéissance, de nous accorder une langue qui évoque الله Allah et un cœur qui craint الله Allah, certes Il est sur toute chose tout puissant.
Ayant tenu mes propos, je demande à الله Allah qu’Il me pardonne ainsi qu’à vous-mêmes.
Second Discours[1] :
الحمد لله والصلاة والسلام على سيدنا محمّد رسول الله يا أيّها الذين آمنوا اتّقوا الله اللهم اغفر للمؤمنين والمؤمنات
Al-hamdou lil-Lahi was–salatou was-salamou ^ala sayyidina محمد Mouhammadin raçouli l-Lah ;
ya ‘ayyouha l-ladhina ‘amanou t-taqou l-Lah.
Allahoumma ghfir lil-mou’minina wal-mou’minat.
[1] Il s’agit des piliers selon Ach-Chafi^iyy pour ceux qui seraient amenés à donner le discours entièrement en français. Les piliers devraient être dits en arabe.